A la fin de l’année 2018, les conseillers prud’homaux de certaines juridictions françaises se sont opposés au barème des indemnités versées en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, institué par l’ordonnance du 2017-1387 du 22 septembre 2017, sur le fondement du droit international et européen.
En effet, les Conseils de prud’hommes de TROYES, d’AMIENS, et de LYON ont jugé que ce barème contredisait notamment certains des textes internationaux en matière de droit du travail, à savoir la convention n°158 de l’Organisation internationale du travail et la Charte sociale européenne du 03 mai 1996.
(Conseil de prud’hommes de LYON, 21 décembre 2018, n°18/01238 – Conseil de prud’hommes de TROYES, 13 décembre 2018, n°18/00036 – Conseil de prud’hommes d’AMIENS, 19 décembre 2018 n°18/00040)
Il est à noter que ces décisions concernaient soit des contextes bien particuliers (exemple : requalification d’un C.D.D en C.D.I.), ou étaient rendues à l’aune de jurisprudences plus anciennes de la Cour de cassation admettant l’effet direct des conventions internationales dans l’ordre judiciaire français (ex : ordonnance relative aux « contrats nouvelles embauches » ratifiée implicitement).
(Cour de cassation, 29 mars 2006 N°04-46499 et du 1er juillet 2008 N°07-4412)
Pourtant, il sera relevé que l’ensemble de ces trois décisions vont dans un sens clairement contraire à une décision du Conseil d’Etat qui a bel et bien jugé que le barème institué par l’Ordonnance du 22 septembre 2017 ne contrevenait pas aux textes internationaux invoqués, et notamment la Convention 158 de l’OIT.Aussi, le Conseil constitutionnel a validé le barème d’indemnisation institué par les ordonnances de 2017.
(Conseil d’Etat, 07 décembre 2017, n° 415243 et Décision du Conseil constitutionnel, 21 mars 2018 n°2018-761)
Dans un sens contraire et selon une jurisprudence du Conseil de prud’hommes du MANS datant du mois de septembre dernier, le référentiel obligatoire pour les dommages et intérêts alloués par le jugement en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse avait pourtant été jugé conforme à la Convention 158 de l’OIT, qui exige une indemnisation adéquate et appropriée du salarié.
Le Conseil de prud’hommes a estimé d’abord que l’indemnité prévue au barème n’empêchait pas le juge de prendre en compte les éléments déterminant le préjudice subi par le salarié, et d’autre part que le barème n’était pas applicable aux contextes de manquement particulièrement grave de l’employeur à ses obligations, en cas de violation d’une liberté fondamentale.
Par ailleurs, la juridiction a refusé de se prononcer sur le respect de la charte sociale européenne, en l’absence d’application directe de ses dispositions à la législation française.
(Conseil de prud’hommes du MANS, 27 septembre 2018 N°17/00538)
Compte tenu du flou juridique impliqué par ces décisions divergentes, nous observerons avec attention la position des Cours d’appel ainsi que celle de la Chambre sociale de la Cour de cassation.